Die Welt ist so alt (Ribac/Büchner)
Chant : Eva Schwabe
Achter Mai (Ribac/Schwabe)
Chant : Eva Schwabe
Un demi-siècle/Ein halbes Jahrhundert
Création en octobre 1995 à la Péniche-Opéra, Paris et dans le Rathaus Schöneberg, Berlin
Opéra pour soliste, interviews et musique enregistrée
Argument
À l’origine de ce projet, il y avait, d’une part, notre désir de réaliser un spectacle sur la mémoire de la deuxième guerre mondiale. D’autre part, nous avions été fortement impressionnés par la façon dont, respectivement, René Lussier (dans son disque le Trésor de la Langue – 1989) et Steve Reich (notamment dans Different Trains -1988- et The Cave -1995) avaient écrit de la musique en suivant les inflexions (et en accompagnant) la voix parlée. L’idée de réaliser des interviews s’imposa rapidement. Au moment où l’on commémorait le cinquantième anniversaire de la défaite nazie, nous avons donc posé deux questions à des lycéens et des jeunes adultes résidant à Paris et Berlin : « que savez vous du 8 mai 1945 » et « comment imaginez vous votre vie dans cinquante ans ? ». Entre ces deux blocs, nous avons inclus une prière hébraïque en souvenir des morts, El Malei Rachamim, évocation de la Shoah. L’opéra se conclut par un poème de Paul Ceylan L’œil du Temps.
“ Voici l’œil du temps
Il regarde, torve
sous un sourcil de sept couleurs.
Sa paupière est lavée de feux,
Sa larme est vapeur.
L’étoile aveugle vole vers lui
Et le cil plus chaud la fait fondre :
Le monde se réchauffe,
Et les morts
Bourgeonnent et fleurissent.”
(avec l’autorisation des Éditions Christian Bourgois)
Il s’agit donc d’une sorte de reportage musical dont l’élement clef consiste dans le dialogue entre une chanteuse “réelle” et des voix numérisées “virtuelles”. Un spectacle pour ainsi dire sans images où la soliste est placée devant un écran qui, tour à tour, projette son ombre où -par un effet de contre jour- dessine sa silhouette.
Presse
Le Monde de la Musique, octobre 1995
Les enfants de Kurt Weill
… À l’instar de Valérie Stephan, François Ribac est à la croisée d’une écriture vocale qui tient tout autant du Ravel de L’enfant et les Sortilèges et de la prosodie américaine d’un Robert Ashley que de l’intégration des rythmes populaires à la manière de Weill. Dans un magnifique et très original premier opéra de chambre intitulé Marguerite et Ida Helena Annabel (1)- donné au Théâtre du Roseau il y a trois ans – dans lequel le musicien alterne avec sensibilité voix parlée et chant, Ribac retrouvait cette idée Weillienne “d’une subvertion sardonique du matériau musical populaire, alors que traditionnellement les compositeurs utilisent ce matériau dans un style classique (Liszt, les compositeurs russes) ou quasi ethnologique chez Bartok -tandis que Weill s’approprie les styles populaires en les détournant comme le fait Stravinski dans Petrouchka”. Comme chez Weill, ce qui porte sa musique, “ce ne sont pas seulement des problèmes musicaux mais des idées ; le choix et le sens du livret, la représentation des personnages et sa combinaison avec d’autres formes artistiques”.
Son deuxième opéra, Un Demi-Siècle, co-écrit avec son interprète principale Eva Schwabe et créé ce mois-ci simultanément à Paris et Berlin, est “une évocation libre – à travers des entretiens avec de jeunes adultes (français et allemands)- des cinquante ans qui viennent de passer et des cinquante ans à venir : la forme est celle d’un dialogue entre la soliste réelle et les voix retravaillées arrangées et harmonisées en studio”. Un Demi-Siècle sera d’ailleurs précédé d’une sélection de mélodies de Weill écrites originellement en allemand français et anglais par plusieurs interprètes (2).
Franck Mallet
(1) François Ribac Marguerite Ida et Helena Annabel (Eva Schwabe, voix) 1 CD No MAn’s Land NML 9319 (distribué par Orkhestra)
(2) François Ribac/ Eva Schwabe Un Demi-Siècle-Ein Halbes Jahrundert, La Péniche Opéra, Paris, les 6, 7 (21 h) et 8 (17 h) octobre 1995